L’éducation selon Saint Jean Bosco #2

De la liberté en éducation

Notes sur le chapitre 2 : De la liberté en éducation

L’éducation des enfants est un juste équilibre entre la contrainte excessive et la licence exagérée. La première part du principe que l’homme est foncièrement mauvais et qu’il faut le corriger sans cesse. La seconde postule, au contraire, que la nature humaine est bonne et qu’elle se pervertit à mesure qu’elle entre en contact avec la société (bonjour Rousseau !).

À vrai dire, “sous les ruines de la nature déchue, il y a encore quelque chose de la beauté et de la grandeur du premier plan”. Toutes les mamans s’en rendent compte en observant leur nouveau-né. Quelle innocence, quelle vulnérabilité !

Comment soutenir cet équilibre entre exigence et liberté ?

“C'est une chose curieuse qu'une classe dans les maisons de Don Bosco. Rien de solennel, de compassé, de doctoral. Une familiarité de bon aloi, qui n'entame en rien le respect dû au professeur, y règne d'un bout à l'autre. Ici comme ailleurs, on exige des leçons impeccables, les devoirs sont minutieusement épluchés, le crible de la correction se montre aussi fin et ténu que dans les meilleurs établissements ; mais, comme dirait le Prince d'Aurec, il y a la manière, et la manière, dans les maisons salésiennes, est toute empreinte de paternité. On y laisse carte blanche à la spontanéité de l'enfant. Une réflexion qui lui traverse l'esprit n'est pas arrêtée aux lèvres par le regard rigide du maître ; elle s'insère tout naturellement dans le tissu de l'explication. Le mot pour rire, l'histoire qui détend les nerfs, l'entr'acte joyeux qui repose les esprits sont du pain quotidien. On sait ici que l'attention de l'enfant est de petite embouchure, et qu'il ne faut pas y entonner de vive force les notions, même élémentaires, du savoir humain. Le maître n'a aucune de ces attitudes qui figent, ou paralysent les langues : tout en lui au contraire appelle, sollicite, réclame la question, l'objection, la demande de lumières. En un mot les classes salésiennes sont plus des causeries que des cours, et, dans le maximum de liberté accordée à cet exercice.”

On le voit, la pédagogie prônée par Saint Jean Bosco a fait des émules, mais les pédagogues actuels n’en ont gardé que les éléments extérieurs : le jeu et la familiarité. La moelle épinière, qui est le respect de Dieu et de ses commandements, a été retirée du corps. Le système s’en voit complètement dénaturé. La spontanéité de l’enfant devient irrespectueuse car elle n’est pas encadrée par les bons principes.

Connaître le cœur des enfants

“[La pédagogie salésienne] tient essentiellement à connaître ce que cachent ces cœurs d'enfants, le monde de désirs, de passions, d'aspirations qui les agitent, pour y porter la lumière, l'ordre et la loi chrétienne.”

Pour sonder le cœur d’un enfant, toute maman le sait bien, il faut qu’il y ait un climat de confiance dans lequel le petit n’a pas peur d’être jugé et sait, en même temps, qu’il doit dire toute la vérité. Il faut aussi de la disponibilité, et ce n’est pas toujours facile surtout quand on a de nombreux enfants. Là aussi, Saint Jean Bosco fait preuve d’une grande ouverture d’esprit. Tous les sujets devraient pouvoir être abordés, avec les mots adaptés. C’est le meilleur moyen d’éviter les cachoteries, les coups en douce, les mensonges.

Exercer la liberté de l’enfant et son discernement

Un autre point de la pédagogie salésienne est très utile dans l’éducation et la vie de famille : alimenter le sens de l’initiative et la responsabilité chez l’enfant. À l’école, ce principe rejoint la pratique courante d’attribuer des “métiers” aux jeunes élèves : untel est responsable du rang, un autre de la disposition des étiquettes pour les activités, un autre encore de l’écriture de la date au tableau, etc. Ces petites tâches sont autant d’occasions, pour l’enfant, d’exercer son sens du devoir avec joie. Dans une école catholique, il faudrait que chacune de ces missions soit un service rendu au nom de Jésus. À la maison, on peut aisément transposer cette pratique pour mettre la table, embellir l’oratoire, veiller sur les plus petits pendant le brossage de dents ou l’habillage, etc. Evidemment, les aînés seront davantage mis à contribution, mais ils ne doivent pas y voir une injustice : les responsabilités sont proportionnelles à l’âge, rien de plus naturel.

Apporter à l’enfant le soutien dont il a besoin sans le couver

L’exercice de la liberté se fait donc toujours sous une surveillance assidue qui offre à la fois un cadre et un réconfort. “Même si l’enfant perd pied, à condition que ce ne soit pas à fond, on le laisse volontiers tirer sa brasse tout seul. On est sur la berge, on surveille l'effort : l'enfant le sait bien ; et si le plongeon est trop sérieux, il n'aura pas même besoin de crier au secours : un bras vigoureux l'aura vite ramené à la rive. Pour nous servir d'une autre image, le surveillant, dans ce système, n'est pas le tuteur impitoyable qui interdit à la plante tout écart de croissance, c'est le jardinier uniquement attentif à lui fournir l'air et la lumière, à amender le sol quand il renferme des matières nutritives peu abondantes, ou dangereuses, ou réfractaires à l'assimilation.”

Cette éducation comporte ainsi deux bons fruits : la connaissance, par l’adulte, du vrai tempérament de l’enfant et donc la possibilité de le guider au mieux sans le mettre sous cloche ; une perspective qui s’étend sur le long terme, puisque l’objectif n’est pas seulement de régler la situation présente, mais bien de préparer l’enfant à sa vie d’adulte.

À son échelle et avec toute l’imperfection de l’homme, cette éducation suit les traces de la grâce de Dieu.

“Comme la grâce, cette pédagogíe est vigilante ; comme elle, elle s'installe au cœur même de la place et ne le lâche jamais ; comme elle, elle respecte la liberté de l'homme, de l'enfant ; mais comme elle aussi, elle se sert de tous les moyens pour la redresser, la discipliner; comme elle, elle ne punit le péché que par ses propres conséquences ; et comme elle, elle exige l'acquiescement volontaire de la conscience ; comme elle enfin elle peut apparaître à certains moments insuffisante et vaincue, mais comme elle, elle finit par avoir le dernier mot et à mener les cœurs à ses fins.”

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